• L'encre et la plume

    J'aimerais quand même te dire
    Tout ce que j'ai pu écrire
    Je l'ai puisé à l'encre de tes yeux.

    Francis Cabrel     L'encre de tes yeux

    Comme tous les petits Français de ma génération,  j'ai appris à écrire à la plume. Les tables de la classe étaient pourvues de petits encriers de porcelaine blanche, encastrés dans un trou circulaire, du côté droit de l'écolier (pas de gaucher !). Après usage, il fallait retirer la plume de son porte-plume en bois, la ranger dans une petite boîte en plastique, au couvercle coulissant, avec la réserve de plumes neuves. J'avais un paquet de buvards multicolores, chargés d'absorber les débordements, les accidents et les pâtés. 

    Puis nous sommes passés, sans transition, au stylo-bille. Il semblerait que le stylo à bille n'ait été autorisé dans les écoles qu'à partir de 1965.
    Mon premier stylo à bille était un Bic cristal. C'était soudain devenu agréable et facile d'écrire ! Trop facile sans doute, puisque la qualité de mon écriture s'est dégradée... J'écrivais tellement mal que mon Bic cristal m'a été retiré et que l'on m'a imposé à sa place  un Bic orange, à écriture fine. Quelle frustration ! Je garde un fort mauvais souvenir de ce stylo qui ne courait pas sur la page et avec lequel écrire devint laborieux.

    La plume métallique

    La plume métallique est une invention hollandaise du 17e siècle. Arrivée en Angleterre au 18e siècle, elle y est produite industriellement au 19e siècle, avec l'acier de Sheffield. La fabrication en France ne commence qu'au milieu du 19e siècle, sur le chemin de l'importation des plumes anglaises, à Boulogne-sur-Mer. La plume métallique remplace alors la plume d'oie.

    Sous son aspect anodin, la plume métallique est un objet plus complexe qu'il n'y paraît : elle est composée d'une pointe et d'un canon, partie qui s'adapte au porte-plume. La base du canon est le talon. Entre le canon et la pointe, la gorge. La pointe elle-même se décompose en un épaulement, une carne et un bec. Le bec présente une fente et un percé.

    L'encre et la plume

    La fabrication de la plume comporte de nombreuses étapes : 

    1. le découpage à la presse à partir de feuilles d'acier ;
    2. le perçage des jours ;
    3. le marquage des inscriptions ;
    4. un recuit pour rendre l'acier plus malléable ;
    5. l'estampage pour imprimer un motif en relief ;
    6. le formage pour donner sa forme cylindrique à la plume ;
    7. une trempe et un recuit pour obtenir la dureté et l'élasticité voulue ;
    8. un nettoyage ;
    9. un aiguisage pour effiler le bec de la plume ;
    10. la découpe de la fente à la presse (opération délicate) ;
    11. un polissage ;
    12. un vernissage pour protéger la plume de l'oxydation.

    Les plumes de mon enfance étaient du type de cette plume Sergent-Major. Je ne suis pas certaine pourtant qu'il s'agissait de cette marque. Il devait y avoir des plumes de marques concurrentes sur le marché, mais la plume Sergent-Major reste la référence.  

    L'encre et la plume

    L'encre

    On oublie souvent que les tabliers que les écoliers portaient autrefois à l'école avaient pour fonction essentielle de protéger leurs vêtements des taches d'encre, et non de jouer le rôle d'un uniforme, susceptible de masquer les différences sociales représentées par les dits vêtements.

    Les Romains de l'Antiquité fabriquaient l'encre avec du charbon de bois résineux, réduit en poudre et délayé avec de la gomme. 

    A partir du 15e siècle, le charbon fait place à la noix de galle et au sulfate de fer. Au contact de l'oxygène de l'air, on obtient un tannogallate de peroxyde de fer, auquel on ajoute une dissolution de gomme arabique pour l'épaissir. 

    Au début du 20e siècle, on utilise pour l'écriture à la plume une encre noire. Celle-ci est produite à base d'une décoction de noix de galle et de bois de campêche, additionnée de sulfate de fer et de sulfate de cuivre, et toujours d'une solution de gomme.Bien que cette encre noire soit accusée de corroder le bec des plumes et de s'effacer avec le temps, elle est préconisée dans les écoles, parce qu'elle offre un meilleur contraste pour la lecture. 
    (Nouveau dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire de Ferdinand Buisson, 1911). 

    On y apprend que le sulfate de fer est aussi appelé couperose verte, ou vitriol vert, et que le sulfate de cuivre est également dénommé couperose bleu, ou vitriol bleu ! L'encre bleue ou violette, d'après cet article, ne présenterait pas les mêmes inconvénients que l'encre noire, ce qui suppose une composition différente. Qu'en est-il ?

    Pour ce qui concerne l'encre violette, il semblerait qu'elle ait été produite à partir de la gentiane, qui produit un pigment naturellement violet.


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :