• L'arbre aux 40 écus

    Le ginkgo biloba est un arbre préhistorique extraordinaire et fascinant.

    Ses feuilles, un peu épaisses, ont une forme unique ("bilobée"), figurant une sorte d'éventail échancré. A l’automne, le feuillage, habituellement d’un vert clair, devient jaune clair, d’une couleur très lumineuse.

    L'arbre aux 40 écus

    Feuille de ginkgo

    La silhouette de cet arbre de taille moyenne est caractérisé par de longues branches très droites, presque verticales, qui lui donnent un aspect hérissé. 

    L'arbre aux 40 écus

     

    Un ginkgo lance ses flèches d'or sur un ciel d'azur...
    Val de Bièvre, automne 2015

    La forte somme

    C'est cette couleur d'or qui lui aurait valu le nom "d’arbre aux 40 écus". Mais il existe une autre explication à ce surnom qui me fait penser, pour ma part, aux 30 deniers de Judas. En 1780, M. de Pétigny, un botaniste parisien, acheta à un horticulteur à Londres cinq jeunes plants de Ginkgo. Il les aurait achetés pour la somme considérable de 25 guinées, soit 40 écus chaque pied (source Wikipedia). Selon une autre source, il aurait fait baisser le prix demandé en enivrant l'horticulteur anglais avec des vins français, et le prix payé de 40 écus, soit 120 francs, serait dérisoire ! Alors, qui croire ? 

    Puisque nous en sommes aux noms portés par cet arbre, voici l'origine de son nom officiel. Le nom de Ginkgo viendrait du japonais Yin-Kuo qui signifie 'abricot d’or' (à cause de ses 'fruits'). Cela est devenu gin-kyo.

    Un faux conifère

    J'avais lu quelque part qu'il s'agissait d'un conifère, mais d'un conifère sans aiguilles, et qui perdait ses feuilles ! En fait, il n'est pas apparenté aux conifères, car il ne produit pas de fruits et de graines comme les gymnospermes. Cette confusion vient de ce que les ovules de ginkgo sont souvent appelés à tort graines ou fruits. En effet, ces ovules ressemblent un peu à des abricots, d'où un des noms vernaculaires du ginkgo, 'abricotier d'agent'. 

    Le ginkgo est le seul représentant de sa famille, les Ginkgoaceae (alors à quoi bon mettre le nom au pluriel ?), et c'est la plus ancienne famille d'arbres connue. Elle existait déjà 40 millions d'années avant l'apparition des dinosaures.

    Cet arbre est originaire du sud-est de la Chine. Il a été exporté au Japon et en Corée au 12e siècle, puis en Europe au 18e siècle. Les premiers spécimens européens ont grandi au jardin botanique d'Utrecht. 

    Le premier ginkgo de France a été planté à Montpellier en 1778. C'est une bouture de ce spécimen qui a été plantée au Jardin des Plantes de Paris en 1795. Ces deux arbres sont toujours vivants. 

    Ils sont loin d'être les plus anciens représentants de l'espèce : le ginkgo du jardin botanique de l'Université de Sendai est âgé de 1 250 ans et il y aurait en Chine des arbres âgés de 4 000 ans... Il semble qu'il s'agisse d'un être vivant potentiellement immortel ! il n'a ni prédateurs naturels, ni parasites, ni maladies.

    Par ailleurs le ginkgo, arbre « préhistorique », est très résistant aux pollutions : il paraît que c’est le premier arbre qui ait repoussé spontanément sur la zone, après les bombardements de Hiroshima et Nagasaki. Tout cela fait du ginkgo un arbre fascinant.

    Un être-temps

    Pour l'être-temps,
    Les mots s'éparpillent...
    Sont-ils des feuilles tombées ?

    Je n'ai pas vraiment l'âme d'un poète, et tout est question d'images et d'interprétation dans les haïkus. Pourtant, quand j'ai lu le poème de ma Jiko, une vision s'est formée dans mon esprit, celle d'un arbre, un vieux ginkgo gigantesque au pied de son temple1. Les feuilles du ginkgo ont la forme de petits éventails. Quand vient l'automne, elles prennent une couleur jaune vif, et en tombant elles recouvrent le sol d'un manteau doré, alors j'ai pensé que ce vieil arbre était sûrement un être-temps, tout comme Jiko est un être temps, et je me suis vue en train de chercher le temps perdu parmi les feuilles tombées au pied de l'arbre comme des mots éparpillés.

    1 Les feuilles de ginkgo donneraient un thé aux vertus bienfaisantes pour la mémoire. On plante souvent ces arbres à l'entrée des temples bouddhistes pour aider les moines à apprendre leurs soutras.

    Ce joli haïku et son commentaire, ainsi que la note explicative,  sont extraites de l'excellent roman de Ruth Ozeki, En même temps, toute la terre et tout le ciel (éd. Belfond 2013). Il s'agit du joli titre français. Le titre original,  A tale for the time being ('un conte pour l'être-temps') nous ramène tout droit à ce petit passage évoquant particulièrement un ginkgo. 

    A noter que l'être-temps est une notion élaborée par Dōgen Zenji, fondateur de l'école Sōtō du bouddhisme zen au Japon au 13e siècle : 

    Selon Dōgen, on ne peut saisir la réalité des choses que sous une forme déterminée. Ainsi, la vérité bouddhique ne peut apparaître que sous une forme déterminée. Chaque partie de la totalité du monde représente cette totalité sous une forme particulière. [...] Le temps n'apparaît [...] que sous une forme déterminée appelée instant. La conception successive du passé/présent/futur est illusoire. Seul l'instant présent est réel. Par conséquent, chaque instant, aussi bref soit-il, "re-présente" le temps dans sa totalité sans qu'il soit nécessaire d'attendre d'autres instants. La vérité bouddhique du temps est le temps tel qu'il est, le présent instantané, maintenant. (article Dōgen, wikipedia).

     

     

     

     

     

     

     


    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :